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me (sic) que j’ai quitté maman et Dédé et étions arrivés à manger les peaux d’oranges et
que j’ai pris le train pour Perpignan. les têtes de poisson salé qu’on trouvait dans la
cour... Quand on en trouvait !
C’est aussi la question argent qui m’inquiétait
pour eux, car peu à peu maman vend tout, Finalement le consul américain nous a fait
meubles bibelots, et même son tapis d’Orient, sortir de prison et après on est allé dans un
le grand qui était si beau, quand elle n’aura camp de concentration pendant 3 mois. Au
plus rien à vendre, je me demande ce qu’elle bout de 5 mois de captivité, je suis enfin arrivé
va faire, car il y a longtemps que la Corse est au Maroc, à Casablanca. Mon oncle qui était
séparée de Marseille, et puis en Corse, ils sur le quai avait peine à me reconnaître, j’étais
étaient même plus serrés pour l’alimentation maigre comme un clou et habillé comme de
que le continent. Heureusement maintenant dernier des clochards. J’avais en tout et pour
que notre cher pays est libéré ! Pour ce qui est tout sur moi un pantalon tout troué, un tricot
de ses souffrances, je sais Papa que, de ton et une paire d’espadrilles, c’est tout ! Bref, de
côté, tu aurais fait tout ton possible pour les ce petit voyage je m’en rappellerai toute ma
atténuer et que si tu ne l’as pas fait, c’est que vie. A peine arrivé, je me suis engagé dans
de ton côté ça n’a pas été certainement l’armée de la libération, mais au bout de 8
toujours rose, c’est pour ça que je n’ai aucune jours de service, j’entrais à l’hôpital pour
rancune contre toi comme tendent à le dire faiblesse générale et là-bas, j’ai eu un peu tout
certaines personnes. : mal d’estomac, dysenterie, panaris au bout
du doigt, eczéma etc... Enfin maintenant ça va
Donc, je te disais, en janvier 1943, j’ai pris le mieux et ça fait 2 jours que je suis sorti. Donc,
train pour Perpignan et j’ai passé la frontière tu vois, mon emploi du temps depuis janvier,
Espagnole en pleine nuit, j’ai traversé les nous sommes en octobre, tu dois comprendre
Pyrénées, j’ai quitté la France à 8 heures du combien ont été durs ces longs mois. Tu ne
soir et à 6 heures du matin, j’étais en Espagne, peux t’imaginer le cafard qui m’assaillit
alors là en Espagne !... J’ai compris ! A peine pendant les longues journées de cellule au
arrivé les carabiniers m’ont foutu en tôle. Les fond de cette Espagne, car je ne savais quand
deux premiers jours sans manger. J’ai fait en je devais sortir ! Il y en avait qui étaient là
tout 52 jours de cellule, après ils nous ont depuis 1 an !
transférés dans un camp de concentration. En
prison les souffrances ont été épouvantables. 27. A Alger, le 18 juin 1944, les évadés
Figure-toi une cellule de 5 m de long sur 2 m célèbrent l’Appel de De Gaulle
de large repoussante de saleté, avec en plus la
tinette et le lavabo. On était parqués 17 et Les évadés fraîchement arrivés en Afrique ont
même 20 dans un espace pareil, impossible de déploré la rivalité à laquelle s’adonnent les
se coucher, presque impossible de s’asseoir, états-majors gaullistes et giraudistes. Ernest
couverts de poux, sans savon, couchés à Gaudet, déjà impliqué en France dans la
même le ciment, 15 jours sans couvertures, Résistance, gaulliste proclamé, qui a pour
avec ça rien à manger, 2 soupes à l’eau par compagnon d’évasion Diomède Catroux, le
jour et 75 gr de pain. J’avais maigri de 17 kg. neveu du général Catroux (représentant du
Presque tout le monde avait la gale. Il y avait général de Gaulle à Alger lorsque ce dernier
un économat avec des vivres, mais on était était encore à Londres). Les deux jeunes
démuni d’argent ! Pas le moindre sou ! Peu à hommes sont arrivés en Afrique car ils n’ont
peu, j’ai tout vendu, stylo, montre, pas réussi à trouver une filière pour
portefeuille, costume, pardessus, et même l’Angleterre. Gaudet est tellement écœuré par
souliers ! 52 jours dans cet enfer ! Nous en l’attitude du représentant gaulliste qu’il

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