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à Londres. Lui aussi fera trop tôt communiaient d’un même cœur, dans une
l’expérience de cette aventure dont on ne sort même douleur et en même temps
pas toujours vivant. Il est tué quelques jours éprouvaient une grande espérance dans
après le Débarquement en Normandie, dont il l’avenir. […]
a été. Dans son journal intime, il relate sans
fausse pudeur ce nouveau drame qui l’a Le 27 novembre, journée fatidique, le quartier
touché au plus profond de son être et l’a fut consigné la nuit, et l’état d’alerte sonné le
convaincu d’aller reprendre le combat ailleurs. matin à dix heures alors que nous étions au
Il n’aura de cesse de vouloir venger par les pansage. Aussitôt, nous retournâmes tous
armes les larmes qu’il n’a pu retenir ce funeste dans nos chambres faire nos préparatifs de
jour. Tout son régiment semble à l’unisson, départ en cas d’une arrivée de l’armée
mais aussi la population d’Auch. allemande. Puis nous allâmes manger.
L’après-midi commença nous trouvant
Le 22 novembre. A huit heures, nous reçûmes désœuvrés car nous attendions des ordres qui
l’ordre d’ouvrir les portes de la caserne et une ne venaient pas. Pour nous désennuyer, le
foule de civils se précipita dans la cour du lieutenant nous proposa une partie de basket-
quartier. Tout se fit dans le plus grand silence. ball. Il y avait à peine dix minutes que la partie
Puis arrivèrent les escadrons motorisés du était engagée, que notre lieutenant nous
quartier Lannes. A neuf heures, les portes appela brusquement. A son visage
furent fermées au public et la cérémonie décomposé, nous comprîmes tous que
commença. La musique joua le salut aux quelque chose de grave se passait.
couleurs et ensuite, dans un silence religieux,
notre colonel prit la parole. Des larmes, qu’il Effectivement, il nous recommanda de
ne cherchait pas à retenir, coulaient le long de monter dans nos chambres avec le plus grand
ses joues. Il nous dit que c’était la rage au calme [et nous annonça] que ne pouvions plus
cœur et les larmes aux yeux qu’il avait été rien faire car les Allemands venaient de
contraint d’exécuter les ordres reçus et sa défoncer la porte du Gers et qu’ils avaient
douleur d’avoir vu son régiment désarmé et envahi tout le quartier. La résistance était
maintenant prêt à être dispersé. Il nous dit impossible. Des larmes de rage impuissante
que bientôt il espérait nous revoir bientôt (sic) nous montèrent aux yeux. A peine étions-nous
et que, alors que nous tous ferions notre arrivés dans nos chambres que les Allemands
devoir et que le drapeau français flotterait à firent irruption, armés de mitraillettes et
nouveau dans une France libérée de braquant sur nous leurs baïonnettes. Nous
l’occupation. étions debout, au garde-à-vous devant notre
lit, opposant à leurs armes le dédain le plus
A peine avait-il terminé qu’une grande complet. Ils firent main basse sur nos
clameur monta. Toute la population aussi bien malheureux sabres et fusils, quant aux
dehors qu’à l’intérieur et toute la garnison munitions, nous n’en avions pas touchées. Ce
avait crié Vive la France ! Les boches qui se fut pour nous la chose la plus cruelle, être
trouvaient là durent trembler en entendant ce désarmés sans se battre. J’eus un accès de
cri. Et ce fut l’adieu à l’étendard. Moi qui était désespoir et me mis à pleurer. Quand tout fut
de garde avec mes camarades, je vis pleurer terminé et que nous pûmes descendre dans la
plus des trois-quarts des gens et entendis les cour, nous vîmes des mitrailleuses braquées
menaces proférées contre les boches. Je ne prêtes à tirer au moindre mouvement de
pus aller baiser les plis de l’étendard étant révolte et de toutes parts les soldats qui
remonté dans ma chambre. Mais toujours je apportaient toutes les armes au manège sous
garderai la vision de tous ces gens qui la surveillance de nos envahisseurs. Puis, plus
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l’expérience de cette aventure dont on ne sort même douleur et en même temps
pas toujours vivant. Il est tué quelques jours éprouvaient une grande espérance dans
après le Débarquement en Normandie, dont il l’avenir. […]
a été. Dans son journal intime, il relate sans
fausse pudeur ce nouveau drame qui l’a Le 27 novembre, journée fatidique, le quartier
touché au plus profond de son être et l’a fut consigné la nuit, et l’état d’alerte sonné le
convaincu d’aller reprendre le combat ailleurs. matin à dix heures alors que nous étions au
Il n’aura de cesse de vouloir venger par les pansage. Aussitôt, nous retournâmes tous
armes les larmes qu’il n’a pu retenir ce funeste dans nos chambres faire nos préparatifs de
jour. Tout son régiment semble à l’unisson, départ en cas d’une arrivée de l’armée
mais aussi la population d’Auch. allemande. Puis nous allâmes manger.
L’après-midi commença nous trouvant
Le 22 novembre. A huit heures, nous reçûmes désœuvrés car nous attendions des ordres qui
l’ordre d’ouvrir les portes de la caserne et une ne venaient pas. Pour nous désennuyer, le
foule de civils se précipita dans la cour du lieutenant nous proposa une partie de basket-
quartier. Tout se fit dans le plus grand silence. ball. Il y avait à peine dix minutes que la partie
Puis arrivèrent les escadrons motorisés du était engagée, que notre lieutenant nous
quartier Lannes. A neuf heures, les portes appela brusquement. A son visage
furent fermées au public et la cérémonie décomposé, nous comprîmes tous que
commença. La musique joua le salut aux quelque chose de grave se passait.
couleurs et ensuite, dans un silence religieux,
notre colonel prit la parole. Des larmes, qu’il Effectivement, il nous recommanda de
ne cherchait pas à retenir, coulaient le long de monter dans nos chambres avec le plus grand
ses joues. Il nous dit que c’était la rage au calme [et nous annonça] que ne pouvions plus
cœur et les larmes aux yeux qu’il avait été rien faire car les Allemands venaient de
contraint d’exécuter les ordres reçus et sa défoncer la porte du Gers et qu’ils avaient
douleur d’avoir vu son régiment désarmé et envahi tout le quartier. La résistance était
maintenant prêt à être dispersé. Il nous dit impossible. Des larmes de rage impuissante
que bientôt il espérait nous revoir bientôt (sic) nous montèrent aux yeux. A peine étions-nous
et que, alors que nous tous ferions notre arrivés dans nos chambres que les Allemands
devoir et que le drapeau français flotterait à firent irruption, armés de mitraillettes et
nouveau dans une France libérée de braquant sur nous leurs baïonnettes. Nous
l’occupation. étions debout, au garde-à-vous devant notre
lit, opposant à leurs armes le dédain le plus
A peine avait-il terminé qu’une grande complet. Ils firent main basse sur nos
clameur monta. Toute la population aussi bien malheureux sabres et fusils, quant aux
dehors qu’à l’intérieur et toute la garnison munitions, nous n’en avions pas touchées. Ce
avait crié Vive la France ! Les boches qui se fut pour nous la chose la plus cruelle, être
trouvaient là durent trembler en entendant ce désarmés sans se battre. J’eus un accès de
cri. Et ce fut l’adieu à l’étendard. Moi qui était désespoir et me mis à pleurer. Quand tout fut
de garde avec mes camarades, je vis pleurer terminé et que nous pûmes descendre dans la
plus des trois-quarts des gens et entendis les cour, nous vîmes des mitrailleuses braquées
menaces proférées contre les boches. Je ne prêtes à tirer au moindre mouvement de
pus aller baiser les plis de l’étendard étant révolte et de toutes parts les soldats qui
remonté dans ma chambre. Mais toujours je apportaient toutes les armes au manège sous
garderai la vision de tous ces gens qui la surveillance de nos envahisseurs. Puis, plus
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