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et quand il faudra. Mais tu conviendras que Miranda, camp de la poussière
dans l’organisation de la Croix Rouge Où sales et à peine humains
Française en Espagne, tout est loin d’être
parfait. Nous nous lavions moins que des chiens.
Ce qui me donne le cafard, c’est d’être sans O tes calles inconfortables,
nouvelles de ma jeune femme enceinte et Tes tables d’officiers sans tables,
perdue je ne sais où. Voilà bien des semaines
que je n’ai pas de nouvelles et j’ai peur que la La dictature des cabos,
Gestapo n’ait mis la main dessus. Ce serait Tes souks et tes extra-perlos,
terrible. Et puis toutes ces missions politiques Tes douches intermittentes,
dont je suis chargé pour différents partis en Les “ colas ”, les longues attentes,
Afrique du Nord et que je ne peux confier à
personne... Que va-t-on dire ? Comment tout Le fumet
cela se terminera-t-il ??? Tu sais depuis 4 mois De tes cabinets,
j’ai eu sur le dos la Gestapo, la police de Vichy,
l’Espagne, tout cela m’a fait perdre mon libre- Le filet
arbitre... Et il faut comprendre mes sautes De tes robinets,
d’humeurs. Nous tous ici te chargeons de
transmettre à Mr Fauré mon cordial bonjour. La fumée
De tes gazogènes,
Reçois mon vieux Neyrolles une solide
poignée de main de ton ami. La curée
Des péroles pleines,
D’autres ont la lucidité de faire le départ entre
le balnéario et les autres lieux d’internement Les duels à coups de couteaux ;
“ visités ” au cours de cette pérégrination Les fusillades des coños ;
espagnole. Il ne suffit pas de quitter
physiquement Miranda pour le quitter dans sa Pleines de flit ou pleines d'huiles
tête. Ce lieu infernal hantera longtemps ceux Les petites lampes qui filent !
qui y ont séjourné. La remémoration des La façon de plier le bras
épreuves endurées occupe l’esprit de ceux qui Pour saluer la bandera :
ont enfin réussi à être transférés dans un
balnéario, où le régime est nettement plus Les revues
favorable. Elle revient comme un remords sous Où l'on remue
les plumes des poètes d'occasion. Dans ce cas,
c’est la gravité qui inspire la plume. Ainsi, à Le fourbi
Jaraba, Pierre Dreyfus-Schmidt écrit un poème Du Samedi
très réaliste et très évocateur, avec un brin Et la vue
d'humour, malgré tout, dédié à ce camp, qu'il Des colis
ne veut plus voir que comme un mauvais Qu'on distribue
souvenir. Ou un “ cauchemar ”, comme Le Mercredi !
l'indique son titre.
Miranda, camp de la misère,
Miranda, camp de la misère Huit jours de grève de la faim
Où nous avons crevé de faim Quel souvenir et quelle fin !
Parce que nous le voulions bien ! De ta boue et de ta poussière
A tout jamais que le Destin
Eloigne de nous le chemin.
Jaraba, Février 1943.
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dans l’organisation de la Croix Rouge Où sales et à peine humains
Française en Espagne, tout est loin d’être
parfait. Nous nous lavions moins que des chiens.
Ce qui me donne le cafard, c’est d’être sans O tes calles inconfortables,
nouvelles de ma jeune femme enceinte et Tes tables d’officiers sans tables,
perdue je ne sais où. Voilà bien des semaines
que je n’ai pas de nouvelles et j’ai peur que la La dictature des cabos,
Gestapo n’ait mis la main dessus. Ce serait Tes souks et tes extra-perlos,
terrible. Et puis toutes ces missions politiques Tes douches intermittentes,
dont je suis chargé pour différents partis en Les “ colas ”, les longues attentes,
Afrique du Nord et que je ne peux confier à
personne... Que va-t-on dire ? Comment tout Le fumet
cela se terminera-t-il ??? Tu sais depuis 4 mois De tes cabinets,
j’ai eu sur le dos la Gestapo, la police de Vichy,
l’Espagne, tout cela m’a fait perdre mon libre- Le filet
arbitre... Et il faut comprendre mes sautes De tes robinets,
d’humeurs. Nous tous ici te chargeons de
transmettre à Mr Fauré mon cordial bonjour. La fumée
De tes gazogènes,
Reçois mon vieux Neyrolles une solide
poignée de main de ton ami. La curée
Des péroles pleines,
D’autres ont la lucidité de faire le départ entre
le balnéario et les autres lieux d’internement Les duels à coups de couteaux ;
“ visités ” au cours de cette pérégrination Les fusillades des coños ;
espagnole. Il ne suffit pas de quitter
physiquement Miranda pour le quitter dans sa Pleines de flit ou pleines d'huiles
tête. Ce lieu infernal hantera longtemps ceux Les petites lampes qui filent !
qui y ont séjourné. La remémoration des La façon de plier le bras
épreuves endurées occupe l’esprit de ceux qui Pour saluer la bandera :
ont enfin réussi à être transférés dans un
balnéario, où le régime est nettement plus Les revues
favorable. Elle revient comme un remords sous Où l'on remue
les plumes des poètes d'occasion. Dans ce cas,
c’est la gravité qui inspire la plume. Ainsi, à Le fourbi
Jaraba, Pierre Dreyfus-Schmidt écrit un poème Du Samedi
très réaliste et très évocateur, avec un brin Et la vue
d'humour, malgré tout, dédié à ce camp, qu'il Des colis
ne veut plus voir que comme un mauvais Qu'on distribue
souvenir. Ou un “ cauchemar ”, comme Le Mercredi !
l'indique son titre.
Miranda, camp de la misère,
Miranda, camp de la misère Huit jours de grève de la faim
Où nous avons crevé de faim Quel souvenir et quelle fin !
Parce que nous le voulions bien ! De ta boue et de ta poussière
A tout jamais que le Destin
Eloigne de nous le chemin.
Jaraba, Février 1943.
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