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Fascicolo Speciale 2021 - Intelligence militare, guerra clandestina e Operazioni Speciali
P armi les multiples fronts de la Seconde Guerre mondiale, zones de com-
bats ou fronts intérieurs, les Pyrénées ne font pas partie des lignes de
force habituellement citées ou étudiées. Or, cette barrière naturelle, de-
venue progressivement une frontière réelle depuis le traité des Pyrénées de 1659,
constitue un espace particulièrement stratégique entre 1939 et 1945. Durant cette
période, dans le camp des Alliés, la plupart des acteurs majeurs ont tenté d’y faire
passer clandestinement informations et agents. A l’inverse, leurs ennemis ont es-
sayé de contrôler les flux, limiter la circulation transfrontalière et arrêter, parmi
d’autres, certains membres des services spéciaux. Depuis des siècles, zone de
passages et lieu d’échanges parfois interlopes, les Pyrénées peuvent être ainsi
considérées comme une ligne de front « incontournable » dans la guerre que les
services secrets se sont livrée à partir de 1939.
Une frontière dans tous ses États :
de la Retirada à l’occupation de la « zone libre »
26 janvier 1939 : Barcelone tombe. La veille, un bombardier allemand, un tri-
moteur Heinkel 111, s’est écrasé au lac de Poueylaün au-dessus d’Arrens dans les
Hautes-Pyrénées, après avoir vraisemblablement combattu au-dessus des Pyré-
nées-Orientales1. Un vent mauvais a déjà franchi la frontière. En réalité, la tragé-
die espagnole, aux implications internationales bien connues, a porté son ombre
côté français dès le début de la guerre civile à l’été 1936. Fuites sous les bombes
et retours angoissés se sont enchaînés à travers les Pyrénées, au gré des déplace-
ments de la ligne de front2.
Toutefois, la Retirada, suite à la prise de Barcelone constitue un mouvement
de population d’une ampleur inédite, puisque près de 475 000 personnes prennent
part à cet exode dont 200 000 combattants environ. Certains repartent très vite
en Espagne. Il faut dire qu’ils y sont « invités » par les autorités françaises et que
Franco leur promet la « clémence »3. D’autres migrent vers l’Amérique latine et
notamment le Mexique. Ainsi, à la fin de l’année 1939, il ne reste plus que 150
000 à 200 000 exilés espagnols en France dont 40 000 à 50 000 femmes et en-
1 José Cubero, Les Hautes-Pyrénées dans la guerre. 1938-1948, Éditions Cairn, 2013,
p. 33.
2 Geneviève Dreyfus-Armand, L’exil des républicains espagnols en France. De la
Guerre civile à la mort de Franco, Albin Michel, 1999, p. 34-35.
3 José Cubero, Petite Histoire des Républicains espagnols, Éditions Cairn, 2019, p. 96-97.
P armi les multiples fronts de la Seconde Guerre mondiale, zones de com-
bats ou fronts intérieurs, les Pyrénées ne font pas partie des lignes de
force habituellement citées ou étudiées. Or, cette barrière naturelle, de-
venue progressivement une frontière réelle depuis le traité des Pyrénées de 1659,
constitue un espace particulièrement stratégique entre 1939 et 1945. Durant cette
période, dans le camp des Alliés, la plupart des acteurs majeurs ont tenté d’y faire
passer clandestinement informations et agents. A l’inverse, leurs ennemis ont es-
sayé de contrôler les flux, limiter la circulation transfrontalière et arrêter, parmi
d’autres, certains membres des services spéciaux. Depuis des siècles, zone de
passages et lieu d’échanges parfois interlopes, les Pyrénées peuvent être ainsi
considérées comme une ligne de front « incontournable » dans la guerre que les
services secrets se sont livrée à partir de 1939.
Une frontière dans tous ses États :
de la Retirada à l’occupation de la « zone libre »
26 janvier 1939 : Barcelone tombe. La veille, un bombardier allemand, un tri-
moteur Heinkel 111, s’est écrasé au lac de Poueylaün au-dessus d’Arrens dans les
Hautes-Pyrénées, après avoir vraisemblablement combattu au-dessus des Pyré-
nées-Orientales1. Un vent mauvais a déjà franchi la frontière. En réalité, la tragé-
die espagnole, aux implications internationales bien connues, a porté son ombre
côté français dès le début de la guerre civile à l’été 1936. Fuites sous les bombes
et retours angoissés se sont enchaînés à travers les Pyrénées, au gré des déplace-
ments de la ligne de front2.
Toutefois, la Retirada, suite à la prise de Barcelone constitue un mouvement
de population d’une ampleur inédite, puisque près de 475 000 personnes prennent
part à cet exode dont 200 000 combattants environ. Certains repartent très vite
en Espagne. Il faut dire qu’ils y sont « invités » par les autorités françaises et que
Franco leur promet la « clémence »3. D’autres migrent vers l’Amérique latine et
notamment le Mexique. Ainsi, à la fin de l’année 1939, il ne reste plus que 150
000 à 200 000 exilés espagnols en France dont 40 000 à 50 000 femmes et en-
1 José Cubero, Les Hautes-Pyrénées dans la guerre. 1938-1948, Éditions Cairn, 2013,
p. 33.
2 Geneviève Dreyfus-Armand, L’exil des républicains espagnols en France. De la
Guerre civile à la mort de Franco, Albin Michel, 1999, p. 34-35.
3 José Cubero, Petite Histoire des Républicains espagnols, Éditions Cairn, 2019, p. 96-97.

