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mas Ferrer • Le “front-tiers” pyrénéen 335

fants. Si ces derniers, trois fois plus nombreux au mois de février 1939, ont été ra-
pidement dispersés dans 77 départements éloignés de la frontière avant d’être en
grande partie rapatriés, près de 275 000 réfugiés ont été internés dans les camps
installés à la hâte sur les plages des Pyrénées-Orientales4.

À la fin de l’hiver 1939, les premiers camps de concentration, selon l’appel-
lation de l’époque5, sont implantés à Argelès-sur-Mer, Saint-Cyprien, Le Bar-
carès puis davantage dans l’arrière-pays, mais non loin de la frontière malgré
tout : Bram dans l’Aude, Gurs dans les Basses-Pyrénées, ou encore Le Vernet en
Ariège6. Or, parmi les dizaines de milliers de combattants républicains jugés dans
un premier temps « indésirables », beaucoup, un peu plus de 50 000, sont incor-
porés dans les Compagnies de travailleurs étrangers (CTE) crées en avril 1939
sous le gouvernement Daladier, puis environ 30 000, doivent s’engager dans les
Groupements de travailleurs étrangers (GTE), instaurés par le régime de Vichy,
pour faire travailler les « étrangers en surnombre dans l’économie nationale », à
partir du 27 septembre 19407.

Évadés des camps d’internement ou ayant fui les GTE, de nombreux Espagnols
s’engagent dans la Résistance, notamment dans les compagnies de guérilleros
qui se sont constituées du Pays basque aux Pyrénées-Orientales en passant par
les Hautes-Pyrénées ou l’Ariège8. L’un des exemples les plus connus est sans
doute le guérillero anarcho-syndicaliste, Francisco Ponzán Vidal. Membre de la

4 Pour les chiffres indiqués ici, nous nous sommes appuyés sur les estimations de Javier
Rubio, « La population espagnole en France : flux et permanences », dans Pierre Milza et
Denis Peschanski, Exils et migration. Italiens et Espagnols en France. 1938-1946, L’Har-
mattan, 1994, p. 40-41 ; Geneviève Dreyfus-Armand, « Les réfugiés espagnols en 1939,
des “indésirables” », Plein droit, vol. 108, n°1, 2016, p. 44-48 ; José Cubero, Petite His-
toire…, op. cit., p. 95-96.

5 Étant donné la connotation prise ensuite par cette expression en référence au système
concentrationnaire nazi, la majorité des historiens spécialistes de la question préfère les
désigner comme des camps d’internement sans occulter la réalité dramatique et souvent
indigne des conditions de vie dans ces camps.

6 Cf. Denis Peschanski, La France des camps. L’internement 1938-1946, Gallimard, 2002.
À noter la publication récente d’un historien spécialiste du camp de Gurs, Claude Laharie,
Petite Histoire des Camps d’internement français, Éditions Cairn, 2020.

7 Geneviève Dreyfus-Armand, « Les réfugiés espagnols en 1939…, op. cit., p. 48 et José
Cubero, Petite Histoire…, op. cit., p. 132.

8 Cf. Geneviève Dreyfus-Armand, « Les oubliés », Hommes et Migrations, n°1148, nov.
1991, p. 36-44 ; Denis Peschanski (dir. ), Des Étrangers dans la Résistance, Éditions de
l’Atelier/Musée de la Résistance Nationale, 2002 ; Jean Ortiz (dir.), Rouges. Maquis de
France et d’Espagne. Les guérilleros, Atlantica, Biarritz, 2006.
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