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mas Ferrer • Le “front-tiers” pyrénéen 339

perpétrer sabotages. Inviter tous services sous vos ordres à redoubler
vigilance dans surveillance frontière, à examiner avec soin situation chaque
étranger rentrant ou tentant entrer en France et me signaler avec toutes
indications utiles arrestations ou refoulements individus suspects24. »

Quatre jours plus tard, le général Chauvin, commandant la 18e région militaire
depuis Bordeaux, ordonne l’interdiction de toute entrée d’étrangers sur le
territoire français même si les papiers des individus contrôlés sont en règle25. Au
même moment, la peur de parachutages massifs ou bien de l’infiltration d’agents
ennemis revient comme une antienne dans les documents préfectoraux26.

La défaite sanctionnée par l’armistice du 22 juin, bouleverse totalement l’or-
ganisation de la surveillance frontalière. A partir du 20 août 1940, les troupes al-
lemandes occupent tout le littoral atlantique jusqu’à Hendaye et la ligne de dé-
marcation se matérialise progressivement entre « zone Nord » occupée et « zone
Sud » dite libre, ou plus justement non occupée, « nono » selon le raccourci de
l’époque. La 18e région militaire centrée sur Bordeaux est dissoute et une par-
tie des Basses-Pyrénées le long d’une ligne allant d’Orthez à Saint-Jean-Pied-
de-Port en passant par Sauveterre et Saint-Palais, ainsi que les Hautes-Pyrénées,
sont rattachées à la 17e région commandée depuis Toulouse. Son état-major qui
se retrouve avec des moyens réduits doit surveiller une ligne frontalière de 330
kilomètres contre 160 auparavant.

Après l’Appel du 18 juin, dont l’écho fut plutôt réduit, et un très funeste été
1940, quelques consciences résistantes commencent malgré tout à se lever. C’est
le cas du jeune polytechnicien Serge Ascher qui veut continuer le combat mais
sans savoir vraiment comment s’y prendre :

« Je m’interroge sur ce que je pourrais faire. Rester sur place ou partir pour
Londres ? […] De tous les pays d’Europe, seul le Portugal maintient des
relations maritimes avec l’Angleterre. J’envisage donc de traverser clan-
destinement l’Espagne pour rallier Lisbonne. La rumeur prétend que l’am-
bassade d’Angleterre y accueille des volontaires venus de France et les em-
barque pour Londres. Mais comment traverser l’Espagne sans connaître la
langue, sans pièces d’identité, sans argent27 ? »

Finalement après avoir renoncé à son projet, Serge Ascher, devenu Serge Ra-

24 Archives départementales des Hautes-Pyrénées (ADHP), 23 W 64.
25 Ibid.
26 Ibid., 20 W 1.
27 Cité par Robert Belot, Aux frontières de la liberté…, op. cit., p. 53.
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