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houettes gigantesques sur le versant d’une Nous reprenons notre marche très difficile
montagne voisine. Le vent souffle violemment maintenant à travers les rochers. Chaque pas
et secoue ardemment quelques arbres qui nous élève de près d’un mètre environ et cette
coiffent le sommet et font un bruit de ascension aurait été impossible de nuit. Notre
tonnerre en se pliant sous lui. Nous passons escale de deux petites heures nous a fait du
maintenant sur l’autre versant de la chaîne bien mais une telle excursion avec sac au dos
que nous longions et la lune nous éclaire le a vivement fait de faire réapparaître la fatigue.
chemin. Du houx sauvage et des plantes à Au bout d’une heure, nous nous trouvons tout
feuilles piquantes cachent le chantier de en haut d’une chaîne. C’est la frontière, me dit
chèvres que nous suivons. mon guide, nous entrons en territoire
espagnol. Adieu France...
Afin de pouvoir poursuivre notre chemin, de
plus en plus pénible, nous attendons le lever Mon guide fait près de 800 mètres avec moi
du jour dans une hutte où mon guide s’étend en Espagne et du haut d’un rocher qui domine
et me convie à me coucher sur le tapis de une région tout entière je reçois ses dernières
feuilles qui sert de lit aux bergers qui y instructions et il me quitte en me souhaitant
passent. Il m’est impossible de dormir. Le vent bonne chance. Dès lors, je n’ai plus qu’à
sur ces hauteurs gronde violemment et agite descendre la montagne et me diriger vers la
tous les arbustes qui représentent la première ferme espagnole tout en bas à l’orée
végétation de ces montagnes. L’aurore du plateau qui apparaît nettement. Cette
apparaît enfin dans un voile brumeux et la descente est excessivement difficile à cause
fraîcheur du matin se fait sentir. Mon guide se de sa pente abrupte. Toujours je descends et
lève et reste sur le seuil de l’abri. Je peux la rivière qui prend sa source à ce massif est
facilement distinguer ses hautes jambes toujours profondément basse. Au bout d’une
maigres tout endurcies à la marche. Il est heure, j’atteins la rivière qui coule entre
pieds nus dans des espadrilles et scrute les d’énormes pierres, éboulis de la montagne.
montagnes voisines. Il revient vers moi et Comme mon guide me l’avait dit, je la traverse
tandis que nous mangeons un peu, je le une première fois sur les pierres, et une
regarde à la lueur des premiers rayons de seconde sur un éboulis de pierres et de terre
soleil qui pénètrent dans la hutte. C’est un qui la barre entièrement. J’atteins un chemin
homme d’une cinquantaine, maigre et endurci de terre qui longe la rivière et l’emprunte pour
par le pays. Il est d’origine espagnole mais me diriger vers la première ferme espagnole.
habite la France depuis de nombreuses La nature sauvage de la montagne a fait place
années. Toutes ces montagnes, toutes les à la riante vallée où se cultivent blé et maïs.
parties de ces montagnes, tous ces sentiers, Derrière moi se dresse l’effroyable muraille de
rien ne lui est inconnu. Ces montagnes ont 2 laquelle je descends. J’arrive à la ferme et me
600 mètres, me dit-il dans un patois que j’ai dirige alors vers le premier village. Le rhum et
peine à comprendre. C’est le catalan qu’il le sucre que j’ai pris me donnent des forces et
mêle de quelques mots de français et lui je marche assez rapidement dans l’espoir
causent des difficultés à parler. Son type n’est d’atteindre mon but. Le deuxième obstacle
pas réellement catalan, mais son teint bronzé était passé sans encombre ; j’en étais très
le ferait rapprocher du type espagnol. Son heureux et cela me donnait des jambes
visage maigre porte deux rides profondes sur malgré le soleil qui commençait à darder ses
les joues ; il reste néanmoins très chauds rayons.
sympathique.
Je traverse champs et prairies, laissant
derrière moi la chaîne montagneuse dont
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montagne voisine. Le vent souffle violemment maintenant à travers les rochers. Chaque pas
et secoue ardemment quelques arbres qui nous élève de près d’un mètre environ et cette
coiffent le sommet et font un bruit de ascension aurait été impossible de nuit. Notre
tonnerre en se pliant sous lui. Nous passons escale de deux petites heures nous a fait du
maintenant sur l’autre versant de la chaîne bien mais une telle excursion avec sac au dos
que nous longions et la lune nous éclaire le a vivement fait de faire réapparaître la fatigue.
chemin. Du houx sauvage et des plantes à Au bout d’une heure, nous nous trouvons tout
feuilles piquantes cachent le chantier de en haut d’une chaîne. C’est la frontière, me dit
chèvres que nous suivons. mon guide, nous entrons en territoire
espagnol. Adieu France...
Afin de pouvoir poursuivre notre chemin, de
plus en plus pénible, nous attendons le lever Mon guide fait près de 800 mètres avec moi
du jour dans une hutte où mon guide s’étend en Espagne et du haut d’un rocher qui domine
et me convie à me coucher sur le tapis de une région tout entière je reçois ses dernières
feuilles qui sert de lit aux bergers qui y instructions et il me quitte en me souhaitant
passent. Il m’est impossible de dormir. Le vent bonne chance. Dès lors, je n’ai plus qu’à
sur ces hauteurs gronde violemment et agite descendre la montagne et me diriger vers la
tous les arbustes qui représentent la première ferme espagnole tout en bas à l’orée
végétation de ces montagnes. L’aurore du plateau qui apparaît nettement. Cette
apparaît enfin dans un voile brumeux et la descente est excessivement difficile à cause
fraîcheur du matin se fait sentir. Mon guide se de sa pente abrupte. Toujours je descends et
lève et reste sur le seuil de l’abri. Je peux la rivière qui prend sa source à ce massif est
facilement distinguer ses hautes jambes toujours profondément basse. Au bout d’une
maigres tout endurcies à la marche. Il est heure, j’atteins la rivière qui coule entre
pieds nus dans des espadrilles et scrute les d’énormes pierres, éboulis de la montagne.
montagnes voisines. Il revient vers moi et Comme mon guide me l’avait dit, je la traverse
tandis que nous mangeons un peu, je le une première fois sur les pierres, et une
regarde à la lueur des premiers rayons de seconde sur un éboulis de pierres et de terre
soleil qui pénètrent dans la hutte. C’est un qui la barre entièrement. J’atteins un chemin
homme d’une cinquantaine, maigre et endurci de terre qui longe la rivière et l’emprunte pour
par le pays. Il est d’origine espagnole mais me diriger vers la première ferme espagnole.
habite la France depuis de nombreuses La nature sauvage de la montagne a fait place
années. Toutes ces montagnes, toutes les à la riante vallée où se cultivent blé et maïs.
parties de ces montagnes, tous ces sentiers, Derrière moi se dresse l’effroyable muraille de
rien ne lui est inconnu. Ces montagnes ont 2 laquelle je descends. J’arrive à la ferme et me
600 mètres, me dit-il dans un patois que j’ai dirige alors vers le premier village. Le rhum et
peine à comprendre. C’est le catalan qu’il le sucre que j’ai pris me donnent des forces et
mêle de quelques mots de français et lui je marche assez rapidement dans l’espoir
causent des difficultés à parler. Son type n’est d’atteindre mon but. Le deuxième obstacle
pas réellement catalan, mais son teint bronzé était passé sans encombre ; j’en étais très
le ferait rapprocher du type espagnol. Son heureux et cela me donnait des jambes
visage maigre porte deux rides profondes sur malgré le soleil qui commençait à darder ses
les joues ; il reste néanmoins très chauds rayons.
sympathique.
Je traverse champs et prairies, laissant
derrière moi la chaîne montagneuse dont
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